History
17th -18th - 19th century > America, USA
17th-19th century > America
From
Louisiane to Louisiana
Louisiana map
from Arrowsmith & Lewis New
and Elegant General Atlas,
1804.
http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b1/Louisiana1804a.jpg
http://en.wikipedia.org/wiki/Louisiana_Purchase
Primary source > Library of Congress
Louisiana.
Lewis, Samuel, 1753 or 4-1822.
CREATED/PUBLISHED
[S.l., 1805]
NOTES
From Arrowsmith & Lewis New and Elegant General Atlas, 1804.
Scale [ca. 21,000,000].
MEDIUM
1 map ; 25 x 20 cm.
REPOSITORY
Library of Congress Geography and Map Division Washington, D.C. 20540-4650
DIGITAL ID
g4050 ct000654
http://hdl.loc.gov/loc.gmd/g4050.ct000654
http://memory.loc.gov/cgi-bin/query/r?ammem/gmd:@field(NUMBER+@band(g4050+ct000654))
From Frank Bond, "Louisiana " and the Louisiana
Purchase.
Washington, Government Printing Office, 1912. Map No. 4.
http://www.washington.edu/uwired/outreach/cspn/hstaa432/lesson_4/louisiana.html
Territorial Acquisitions of the United States
pagetacq3 INTERIOR-GEOLOGICAL SURVEY, RESTON, VIRGINIA-2005
http://nationalatlas.gov/printable/images/pdf/territory/pagetacq3.pdf
http://nationalatlas.gov/printable/territorialacquisition.html
http://nationalatlas.gov/printable.html
Maps of the United States > States
states2.pdf INTERIOR-GEOLOGICAL SURVEY, RESTON, VIRGINIA -
2003
http://www.nationalatlas.gov/printable/images/pdf/outline/states.pdf
http://nationalatlas.gov/
Reference and Outline Maps of the United States
http://nationalatlas.gov/printable/reference.html
Citation de Napoléon Bonaparte extraite de l’Histoire de la
Louisiane
par Barbé-Marbois, François (1745-1837)
Titre(s) : Histoire de la Louisiane et de la cession de cette colonie
par la France aux États-Unis de l'Amérique septentrionale [Texte imprimé] ;
précédée d'un Discours sur la constitution et le gouvernement des États-Unis
/
par M. Barbé-Marbois,...
Publication : Paris : impr. de F. Didot, 1829
BNF > Gallica
http://visualiseur.bnf.fr/Visualiseur?Destination=Gallica&O=NUMM-213552&P=282
François Barbé-Marbois
et la cession de la Louisiane
François Barbé-Marbois (1745-1837), dont la carrière traverse
cinq décennies tumultueuses, est l'un des diplomates et administrateurs français
les plus habiles de son temps. Il est en 1779 l'un des premiers diplomates
français à servir aux États-Unis, où il organise les bureaux consulaires de la
France avant d'être nommé intendant de Saint-Domingue en 1785. À ce poste, il
entreprend une série de réformes controversées et se fait des ennemis parmi
l'élite des planteurs, ce qui l'oblige à regagner la France en 1789. L'année
suivante Barbé-Marbois est nommé ambassadeur auprès de la Diète allemande, puis
en 1795 il est élu en France au Conseil des Anciens.
Suite au coup d'État du 18 Fructidor an V (4 septembre 1797), il est exilé en
Guyane avec les plus conservateurs de ses collègues. Il retourne en France au
printemps 1800 et l'année suivante, Bonaparte le nomme conseiller d'État, puis
ministre du Trésor - le poste qu'il occupe lors de la cession de la Louisiane.
En 1808, Napoléon le désigne comme président de la Cour des comptes, en charge
du contrôle des finances gouvernementales, où il reste en fonction vingt-sept
ans. Barbé-Marbois est aussi l'un des cinq sénateurs napoléoniens qui rédigent
le texte fondateur de la Restauration, connu sous le nom de Charte de 1814. Ses
services sont récompensés à deux reprises par Louis XVIII, qui lui accorde le
titre de comte, puis de marquis.
Documents associés :
- Barbé-Marbois demeure très intéressé par le développement des États-Unis tout
au long de sa carrière et reste en correspondance avec des personnalités
importantes telles que James Monroe. Au début des années 1820, il doit faire
face à de nombreux détracteurs français, pour qui la cession de la Louisiane est
une erreur monumentale. En écrivant son Histoire de la Louisiane, il souhaite
rappeler à ses compatriotes le contexte historique qui présida à la décision de
Bonaparte. L'ouvrage contient également quelques unes des meilleures
observations d'origine étrangère sur les institutions des États-Unis à paraître
avant la publication De la Démocratie en Amérique d'Alexis de Tocqueville
(1835-1840).
- Avant de devenir le cinquième président des États-Unis, James Monroe acquiert
une expérience considérable en tant que diplomate. À Paris au printemps 1803,
lors des négociations sur la Louisiane, Monroe se lie d'une cordiale et solide
amitié avec Barbé-Marbois. Lorsque ce dernier envisage en 1822 d'écrire un
traité sur le développement constitutionnel des États-Unis et le rôle qu'y joua
la Louisiane, il consulte Monroe qui trouve l'idée tellement bonne qu'il lui
procure divers documents américains dont deux volumes de papiers d'État. Cette
documentation permet à Barbé-Marbois de présenter en parallèle, dans son
ouvrage, les positions diplomatiques françaises et américaines.
- Figure importante des négociations sur la cession de la Louisiane et membre du
cabinet qui jouit de toute la confiance de Bonaparte, Barbé-Marbois comprend
mieux que la plupart des Français et des Américains les calculs qui président à
la décision de vendre la Louisiane au printemps 1803. À l'instar d'une grande
partie de la diplomatie française du siècle précédent, cette décision doit être
comprise dans le contexte de la rivalité persistante entre la France et la
Grande-Bretagne. Bonaparte espère que les États-Unis pourront bientôt
concurrencer la Grande-Bretagne comme puissance maritime et commerciale. " Je me
rendrai utile à tout l'univers ", dit-il, en parlant des Britanniques, " si je
peux empêcher qu'ils règnent sur l'Amérique comme ils règnent en Asie. "
François
Barbé-Marbois et la cession de la Louisiane,
BNF,
copié 23.10.2005,
http://gallica.bnf.fr/FranceAmerique/fr/D2/T2-5-3-a.htm
France in America > The Colonies
In the 18th century New France extended from the Gulf of St.
Lawrence to the Gulf of Mexico and included the Great Lakes region and the
Mississippi Valley. It comprised three distinct colonies: Acadia, founded in
1604-05 and limited to Ile Royale after 1713; Canada, the colonization of which
began with the founding of Quebec in 1608; and Louisiana, where French
settlement began in 1699.
The colonial population of New France was small--3,000 colonists in 1660 and
some 90,000 colonists a century later (compared to 1.6 million in the 13 British
colonies). French migration to New France--in contrast to British colonial
migration--was not fed by urban poverty or religious persecution and, in the
long run, the French state was not very active in supporting population growth
in the colonies.
This lack of demographic vigor had three principal consequences: an inability to
exploit intensively the whole territory claimed; a direct alliance with the
Indians; and, in Louisiana, the need to resort to servile labor. France’s North
American empire possessed a decidedly multiethnic character. Amerindians, French
colonists, and Africans--slaves for the most part--associated daily and gave
birth to distinctive communities that still mark North American society.
France in America >
The Colonies, Library of Congress, copié 23.10.2005,
http://international.loc.gov/intldl/fiahtml/fiatheme2.html
Quand la Louisiane était française
Publié le 16/02 [sic] à 13:16
France2.fr > Dossiers Monde
Laurent Ribadeau Dumas
Il y a 200 ans,
les USA prenaient possession de la
Louisiane,
jusque-là sous administration française
Sans avoir tiré un seul coup de feu,
le tout nouvel Etat doublait
du jour au
lendemain son territoire,
en achetant la colonie
pour 15 millions de dollars.
Dans le même temps,
la France, gouvernée par Bonaparte,
tout à ses rêves de
grandeur,
préférait se recentrer sur le vieux continent,
en évitant de disperser
ses forces
par delà les mers...
La Louisiane change de maître...
Bonaparte était avant tout un réaliste. Il savait le président
américain, Thomas Jefferson, désireux d'acquérir le port de la Nouvelle-Orléans,
débouché commercial incontournable à l'embouchure du Mississipi, pour assurer
l'avenir économique de son pays. Il était donc prêt, tôt ou tard, à s'emparer
par la force de ces "quelques arpents de terre"...
Ce n'est pas que le premier consul ne rêvait pas d'un empire colonial... En
1801, il n'avait pas hésité à envoyer un corps expéditionnaire de 20.000
soldats, commandé par son beau-frère, le général Charles Leclerc, pour écraser
une rébellion d'esclaves sur l'île antillaise de Saint-Domingue. Le chef des
rebelles, Toussaint-Louverture, avait proclamé l'autonomie de l'île. Pour
Bonaparte, celle-ci devait servir de base maritime arrière pour le commerce de
la canne à sucre, du café et du coton, cultivés et récoltés par des esclaves.
Elle devait ainsi être le pilier d'un empire français en Amérique du nord.
Dans ce contexte, la Louisiane en valait la chandelle, avec une superficie de
1,65 million de km2, deux fois celle de la France. On ne le sait pas toujours:
ce territoire français s'étendait de la frontière canadienne... au golfe du
Mexique, des Rocheuses au Mississipi.
Mais en réalité, celui-ci n'a été français que par intermittence: en 1762, Louis
XV, défait pendant la Guerre de Sept ans, l'avait secrètement cédé à l'Espagne.
Laquelle l'avait tout aussi secrètement rendu à la France... en 1800 par le
traité de San Ildefonse.
En 1802, l'expédition de Saint-Domingue tourne court. Les combats sont
difficiles. Débordé par le nombre, Toussaint-Louverture se soumet mais Leclerc
meurt de la fièvre jaune. Dans le même temps, les Britanniques sont prêts à
fondre sur la Nouvelle-Orléans avec 20 navires qui rôdent dans le golfe du
Mexique. "Foutu sucre! Foutu café! Foutues colonies!", s'exclame alors le
premier consul qui apprend l'échec antillais en janvier 1803. Il sait qu'il ne
dispose pas de la flotte suffisante pour défendre la possession.
En mars de la même année, le président Jefferson envoie en France un émissaire,
James Monroe. Sa mission: acheter le port de la Nouvelle-Orléans, la Floride et
obtenir la liberté de navigation sur le Mississipi.
A Paris, le terrain politique est mûr pour une transaction. "Les Anglais
n'auront pas le Mississippi qu'ils convoitent. Je songe à la céder aux
Etats-Unis. Je considère la colonie comme perdue et il me semble que, dans les
mains de cette puissance naissante, elle sera plus utile à la politique et même
au commerce de la France que si je tentais de la garder". Arrivé à Paris, Monroe
se voit alors proposé d'acheter toute la province.
Les discussions sont rondement menées. L'accord, rédigé en français, est conclu
le 30 avril. Le temps de le traduire en bel et bon anglais, il ne sera signé que
le 3 mai. Avec application officielle le 20 décembre.
Les Français vendent leur possession pour 15 millions de dollars (300 millions
d'aujourd'hui). Soit 9,5 cents l'hectare.
Pour le jeune Etat américain, la somme n'en est pas moins
considérable: elle représente en effet 1,5 fois son produit national brut. Elle
est financée par le biais d'obligations à 6 % auprès de banques hollandaises...
et britanniques. Le président des Etats-Unis a chargé de la transaction son
secrétaire au Trésor, le Suisse Albert Galatin. Ce dernier réussit à obtenir de
la partie française une réduction de 20 % sur la somme négociée. Motif: un
dédommagement des pertes infligées au commerce des Etats-Unis d'Amérique par les
Français pendant la Révolution...
Si la somme est considérable, elle en vaut la chandelle. La toute nouvelle
nation, née 27 ans plus tôt, double d'un coup et pacifiquement son territoire
d'une superficie équivalant à 18 Etats américains d'aujourd'hui.
"L'acquisition de la Lousiane a façonné la destinée de ce grand pays. Elle l'a
placé dans la position de devenir une puissance mondiale", n'hésite pas à dire
aujourd'hui Kathleen Babineau Blanco (Babineau: tiens, un nom français !),
lieutenant-gouverneur de l'actuel Etat de Louisiane (donc beaucoup plus petite
que l'"ancienne").
"En débloquant la frontière symbolique du Mississipi, la transaction allait
ouvrir la voie à l'expansion vers l'ouest", explique l'historien Jean-Jacques
Roure, de l'association France-Louisiane. Elle a ainsi permis l'émergence d'un
des éléments fondateurs du mythe américain, la légendaire ruée vers l'Ouest.
L'ouverture de pistes dans cette direction, notamment l'Oregon Trail, allait
déclencher un exode sans précédent vers le Pacifique.
La Louisiane française
C'est en 1682 que la Louisiane est devenue officiellement
française. René Cavelier, sieur de la Salle, prend possession du territoire au
nom de la France et la baptise Louisiane en l'honneur de Louis XIV. Cavelier
était parti du Canada pour chercher un passage vers le Pacifique... en
descendant le fleuve Mississipi qui se jette en fait dans le golfe du Mexique.
Auparavant, la région avait été explorée par les Espagnols. Puis par des
missionnaires jésuites, des aventuriers anglais, espagnols, français, des
chasseurs, des déserteurs...
"Sur le bord de l'océan, Cavelier fait découper dans une marmite de cuivre les
armes de Louis XIV, les encloue sur un chêne et déclare: 'Je te nomme
Louisiane!'", raconte dans "L'Express" le journaliste Maurice Denuzière, qui a
écrit "Au pays des bayous" (Fayard). Au début, le roi ne s'y oppose pas. Mais en
1697, par le traité de Ryswick, il fait reconnaître ses droits sur le
territoire.
Puis la Louisiane va sombrer dans l'oubli. En 1699 arrive une nouvelle
expédition française commandée par Pierre d'Iberville qui fonde La
Nouvelle-Orléans, en hommage au régent, le duc d'Orléans. "En 1718, l'architecte
Adrien de Pauger en dessine le plan avec des rues à angle droit, ce qu'on
appelle aujourd'hui le 'Vieux Carré'", explique Maurice Denuzière.
Les Français espèrent trouver des minerais. Mais ils ne trouvent que des
marécages, des alligators, des moustiques et la fièvre jaune. La colonie coûte
cher. Louis XV décide alors de confier le monopole d'exploitation à un financier
écossais, John Law. Mais les colons ne viennent pas. On fait venir de la mère
patrie des jeunes orphelines de bonnes familles désargentées... qui vont être
confrontées à des aventuriers rustauds. Echec. Arrivent ensuite, amenées de
force, des trafiquantes de sel et des prostituées. La Louisiane va commencer à
se peupler. Lentement.
En 1730, on commence à planter du coton. Pour le cultiver, on "importe" des
esclaves venus d'Afrique. Mais Louis XV, que l'Amérique n'intéresse pas, décide
de se débarrasser du territoire. Et le confie secrètement à l'Espagne en 1762.
Les Louisianais ne l'apprendront que bien plus tard. Sans s'en offusquer !
En 1755, les 10.000 Acadiens français, installés en Nouvelle-Ecosse et au
Nouveau-Brunswick (aujourd'hui ouest du Canada) et devenus citoyens de sa
Gracieuse Majesté britannique depuis le traité d'Utrecht en 1713, refusent de
prêter un serment d'allégeance à leurs nouveaux maîtres. Ils sont alors expulsés
de force et commencent une errance qui va durer approximativement jusqu'en 1763.
Une bien sombre période que les Canadiens francophones appellent le "Grand
Dérangement". Ils se réfugient notamment en Louisiane.
Les nouveaux maîtres espagnols ne sont pas très présents. Et les communautés
française et espagnole se côtoyent sans heurts.
Seul problème: en 1776, le gouverneur hispanique va remplacer
le vin de Bordeaux par un breuvage espagnol. Tollé. Les colons veulent redevenir
français. Leur ancien souverain s'en moque. Les Louisianais expulsent le
gouverneur sacrilège. Certains d'entre eux vont alors fonder une république
indépendante. Dix ans avant la Révolution américaine, treize avant la française
! Ils rédigent un semblant de Constitution. Veulent créer un Parlement. Mais le
roi d'Espagne ne l'entend pas de cette oreille. Des troupes espagnoles
débarquent et les six principaux insurgés sont fusillés.
Pourtant, Madrid ne s'est jamais vraiment intéressé à la Louisiane et ne l'a
jamais réellement occupé. Conséquence: le 1er octobre 1800, par le traité de San
Ildefonse, l'Espagne rétrocède à la France ses droits sur la colonie...
L'histoire s'accélère. Le représentant de Paris, le baron Pierre-Clément de
Laussat, qui porte le titre de préfet, n'arrive qu'en mars 1803, un mois avant
la vente du territoire aux Etats-Unis. Les planteurs sont ravis. D'autant plus
ravis que le Consulat a décidé que l'eslavage serait maintenu.
Pendant ce temps, en métropole, les négociateurs américains "proposent une
grosse somme pour cette acquisition. La réponse de Bonaparte les stupéfie: pour
le même prix, il offre la Louisiane toute entière", raconte Maurice Denuzière
dans "L'Express". L'aventure américaine du territoire commence...
Les Louisianais (au moins ceux qui ne sont pas réduits en esclavage...) semblent
avoir bien accepté leur nouvelle administration. D'autant plus que la culture du
coton se développe.
En 1812, la Louisiane, réduite à une plaine côtière le long du golfe du Mexique,
devient le dix-huitième Etat des Etats-Unis d'Amérique.
L'immigration française ne s'est pourtant pas tarie pour autant. On estime ainsi
qu'entre 1820 et 1860, 50.000 Français sont venus s'installer en Louisiane pour
des raisons économiques. Une manière d'illustrer ces propos du baron de Laussat
lancés à la foule lors de la cérémonie de cession: "Puissent un Lousianais et un
Français ne jamais se rencontrer, aujourd'hui ou demain, ici ou ailleurs, sans
ressentir des sentiments d'affection et sans être mutuellement disposés à
s'appeler frères".
Les Cajuns
En dehors des nombreuses tribus amérindiennes, l'immense
Louisiane française était fort peu peuplée. En 1803, on y comptait quelque
50.000 âmes, la plupart résidant dans le port de La Nouvelle-Orléans et le long
du Mississipi. Sur ces 50.000 personnes, bien peu étaient réellement d'origine
française. Ainsi quand il arrive sur place en 1803, le baron de Laussat découvre
que la moitié d'entre elles sont noires et sont donc des esclaves.
La population de la Louisiane est en fait un melting pot où Améridiens, hommes
blancs et hommes noirs cohabitent tant bien que mal. Les premiers colons
français ont été rejoints à partir de 1755 par les Acadiens, ces Francophones de
Nouvelle-Ecosse (d'origine normande, bretonne et poitevine) chassés par le
colonisateur britannique. Au XVIIIe et au début du XIXe (lors des révoltes
d'esclaves de Saint-Domingue) arrivent de riches planteurs blancs créoles
français (ou espagnols).
Les Louisianiais vont alors prendre le nom de Cajuns, prononciation
anglo-saxonne du terme acadien.
D'autres vagues d'émigrants vont suivre : italienne, irlandaise, liées à la
Guerre de sécession et à la découverte du pétrole au début du XXe siècle...
Aujourd'hui, un Cajun est, selon le "Petit Robert", "un francophone de Louisiane
qui parle une langue d'origine acadienne", variante du français canadien. On
estime à 700.000 le nombre de Cajuns vivant dans l'Etat américain de Louisiane
(sur quelque 4,3 millions d'habitants).
Les Acadiens ont longtemps vécu en marge de la communauté anglophone. Ils
construisaient leurs maisons en bordure des bayous (du mot indien bajuk
signifiant rivière), marais infestés de crocos. Ils gagnaient leur vie grâce à
la pêche, l'agriculture et l'artisanat. Parlant un dialecte francophone que bien
peu de non-Cajuns pouvaient comprendre, ils ont développé "une culture bien à
eux (musique, arts, cuisine), loin de tous, comme retirés du monde", observe "Le
Soir" de Bruxelles.
Plusieurs générations de Cajuns sont ainsi restées non scolarisées et
illettrées, vivant simplement repliées sur leurs terres. Une population méprisée
par les riches créoles. Le Cajun "était souvent et injustement considéré comme
un gentil bouffon, ignorant, parlant le français, menant une existence
rudimentaire dans les marais. Un rustre brave et facile à vivre qui n'avait ni
ne demandait rien tant qu'il pouvait aller au 'Fais dodo' (bal) le samedi soir
et à la messe le dimanche", explique au "Soir" un habitant de Lafayette.
La culture cajun
A partir de cette image se sont développés d'inévitables
clichés. Les Cajuns et, au-delà les Louisianiais, sont censés mener un style de
vie qui leur est propre, une joie de vivre résumé par l'adage "Laissez les bons
temps rouler". "La joie de vivre est un étendard qui flotte avant tout dans les
soirées 'Fais dodo', ainsi baptisées du nom de la pièce où les enfants étaient
réunis pour dormir pendant que les parents dansaient. Toujours d'actualité, le
bal reste un heureux moment de réunion pour grands et petits sur musiques
traditionnelles accompagnées par le bandonéon, le triangle, le violon et la
guitare", écrit "L'Express".
"Les Cajuns ont du sang latin: ils s'emportent rapidement et passent très vite
du rire à la colère, et inversement. Ils mettent autant d'ardeur à s'amuser qu'à
travailler, et ils travaillent dur", a expliqué à "L'Express" un habitant de
Lafayette.
Au-delà des clichés, la culture cajun n'en est pas moins une réalité.
Au niveau du paysage, d'abord. L'influence française a ainsi créé un milieu
rural particulier: les parcelles allongées, les fermes alignées le long des axes
de communication constituant des villages-rues, rappellent l'époque de la
colonisation. Il y aussi l'héritage de la ville et des plantations, légué par
les riches créoles. Ceux-ci ont construit leurs hôtels particuliers dans le
Vieux Carré de La Nouvelle-Orléans, où ils séjournaient en hiver. Aujourd'hui,
le French Quarter est entièrement... américain. Il ne subsiste que des
antiquaires et les noms des rues, évocateurs: Bourbon, Dauphine, Toulouse...
La gastronomie "cadienne" est réputée: friture de crocodile ou de poisson chat,
crabes mous grillés et crustacés à toutes les sauces, boudins, écrevisses à
l'étouffée, po-boy (sandwich chaud), gumbo (soupe épaisse épicée servie sur du
riz)...
Il y aussi la musique. Le jazz à La Nouvelle-Orléans, avec Louis Armstrong,
Mahalia Jackson, les frères Marsalis, Harry Connick Jr. La musique des danses et
chansons ("Ma blonde est partie") francophones, sur fond de violon et/ou
d'accordéon. De leur côté, les noirs ont développé une variété de blues
imprégnée du rythme des danses, le zydeco, qui s'ouvre aujourd'hui à
l'électrification et au rock'n'roll.
Grandes figures de la musique cajun moderne: Michael Doucet (né en 1951), et
surtout Zachary Richard (né en 1950), qui fusionne créole, rock, zydeco tout en
chantant en français.
Et la langue française dans tout ça ?
Lors du recensement de 1990, quelque 250.000 Louisianais ont
indiqué que le français était la langue principale parlée chez eux. Cette
population demeure surtout dans le sud-ouest de l'Etat, parsemant la région "de
consonances rurales, comme le bayou Lafourche, le bayou Lacombe, la
Pointe-aux-Chênes, Terrebonne, le lac Palourde, Grand-Cocteau...", écrit "Le
Monde".
La pratique de leur idiome a été broyée par le rouleau compresseur anglophone.
De plus, à partir de 1930, les autorités ont imposé l'anglais à l'école. Les
enfants surpris à parler français se faisaient taper sur les doigts, au sens
propre du terme. Cette interdiction a "eu des effets psychologiques
dévastateurs", témoigne dans "Le Monde" Kathleen Babineaux Blanco,
lieutenant-gouverneur de l'actuelle Louisiane. Ses deux parents étaient
bilingues mais n'ont pas encouragé leurs enfants à parler la langue de Molière,
en raison de l'interdiction scolaire. "Mon père appartient à cette génération
d'enfants qui ne parlait que le français quand ils sont arrivés à l'école" mais
qui "ont été réprimés", ajoute-t-elle.
"Il y a moins d'un quart de siècle, on se moquait des Cajuns, on les méprisait.
Ils étaient traités d'incultes, de paysans. Aujourd'hui, les mentalités
changent. Il y a un mouvement qui s'amorce. Il y a une fierté retrouvée dans ce
passé lointain", observe dans "Le Soir" Philippe Gustin, un Belge venu enseigner
le français en Louisiane en 1974 et aujourd'hui directeur du Centre
international de Lafayette.
"Si nous n'apprenons pas le français à nos enfants, il va disparaître", explique
Kathleen Babineaux Blanco. D'où la création de classes d'immersion dès la
maternelle, dans lesquelles les matières principales sont enseignées à la fois
en français et en anglais. Conséquence: près de 500 enseignants étrangers
travaillent en Louisiane. Ce mouvement de renaissance de la culture est
notamment soutenu par le Conseil pour le développement du français en Louisiane
(CODOFIL), fondé par le législateur en 1968. Objectif: ¿faire tout ce qui est
nécessaire pour encourager le développement, l'utilisation et la préservation du
français tel qu'il existe en Louisiane pour le plus grand bien culturel,
économique et touristique pour l'Etat¿.
La reconnaissance de la langue française continue à progresser. En 1980, un juge
fédéral a déclaré les Cajuns minorité protegée par l`Acte de droit civil de
1964. Et tout au long de l'année 1999, une "FrancoFête" a réuni plusieurs
centaines de milliers de personnes pour fêter le tricentenaire de l'installation
des Français à l'embouchure du Mississipi.
Les commémorations
Le bicentenaire de la vente de la Louisiane est l'occasion de mettre en sourdine
les divergences entre la France et les Etats-Unis. Le président de l'Assemblée
nationale française, Jean-Louis Debré, a assisté à une commémoration à la
Nouvelle-Orléans aux côté de la secrétaire américaine à l'Intérieur, Gale
Norton.
L'occasion de voir notamment une mise en scène durant laquelle des acteurs
jouaient en costume la signature des documents de vente. Ni le président George
W. Bush ni son homologue Jacques Chirac n'avaient prévu d'y participer. "Ca ne
tombait pas bien dans leur emploi du temps", a remarqué diplomatiquement une
responsable de l'Etat de Louisaine, Kimberly Wooten Rosenberg...
Initialement, Jacques Chirac avait été invité. Mais, malgré les liens
historiques entre la Louisiane et la France, sa venue était controversée en
raison de son opposition résolue à la guerre en Irak. La francophobie du début
de l'année 2003 "n'a pas totalement disparu", relève un éditorialiste du "New
Orleans Times-Picayune", James Gill. Un élu de l'Etat avait même tenté de
retirer l'invitation....
Pour le président de la branche locale de la Chambre de commerce
franco-américaine, Damien Regnard, la vigueur du sentiment anti-français aux
Etats-Unis s'est émoussée ces derniers mois, sans avoir disparu. "La
francophobie, c'est quelque chose qui est derrière moi, mais il reste des
cicatrices. Maintenant, on peut dire le mot en F - France - sans s'attirer des
regards en
coin", explique-t-il.
Ce climat n'est cependant pas dans la tradition d'un Etat qu'il continue de
considérer comme "très francophile et francophone, et très ami avec la France.
Ces liens et l'aspect historique étaient une formidable occasion [pour Bush et
Chirac] de parler d'autre chose que de l'Irak, et de célébrer l'amitié entre les
deux pays", regrette Damien Regnard. Pour autant, peu de manifestations
francophobes ont été observées aux Etats-Unis.
La cérémonie de samedi a clôturé un an de cérémonies du bicentenaires, marquées
par des conférences, des expositions, des représentations théâtrales, un opéra
et même l'édition d'une cuvée spéciale de beaujolais. Elle s'achèvait sur deux
grandes réceptions, dont l'une se voulait une réédition du bal donné par le
Français Pierre-Clément Laussat dans la ville en 1803, en costumes et au son
d'une musique d'époque.
A Paris, une exposition sur la "Louisiana Purchase" est organisée à la Mona
Bismark Foudation. Elle présente de nombreux documents historiques, tableaux,
gravures, photos et affiches, prêtés pour la plupart par l'Historic New Orleans
Collection, mais aussi par les archives diplomatiques françaises. Parmi ces
documents une carte "très curieuse" (dixit le carte) de 1719.
Mona Bismarck Foundation
34 avenue de New York, 75116 Paris; 01 47 23 38 88
Quand la Louisiane était française,
http://info.france2.fr/dossiers/monde/89559-fr.php
Birds' eye view of New-Orleans /
drawn from nature on stone by J.
Bachman [i.e., Bachmann].
Bachmann, John, artist.
CREATED/PUBLISHED
New York : Published by the agents A. Guerber & Co., c1851
(Printed by J.
Bachman [i.e., Bachmann])
SUMMARY
Bird's-eye view of New Orleans,
Louisiana with the Mississippi River in the
foreground.
Copyright by A. Guerber & Co., New York.
Reference: LC Panoramic maps (2nd ed.), 240.1
MEDIUM
1 print : lithograph, tinted ; 74 x 95.5 cm. (sheet)
http://memory.loc.gov/cgi-bin/query/D?gmd:1:./temp/~ammem_b4Hv::
Thomas Jefferson
1743-1826
Third president of the United States 1801-1809
https://www.monticello.org/thomas-jefferson/louisiana-lewis-clark/the-louisiana-purchase/
http://memory.loc.gov/ammem/today/apr13.html
http://memory.loc.gov/ammem/today/feb17.html
http://www.loc.gov/exhibits/jefferson/
http://memory.loc.gov/ammem/collections/jefferson_papers/
http://memory.loc.gov/ammem/today/oct20.html
http://www.pbs.org/jefferson/
L'auteur du
best-seller Louisiane
revient sur
les conditions de la vente
du territoire par Bonaparte en 1803
Maurice Denuzière :
«Bonaparte a
cédé la colonie en trois jours»
Dans l'aventure
coloniale française, la Louisiane occupe une place à part. Un livre vient à
propos nous rappeler que son annexion en 1682 par Cavelier de La Salle et sa
vente par Bonaparte, Premier Consul, en 1803, se firent sans affrontements
majeurs. Maurice Denuzière, journaliste et auteur du best-seller Louisiane, a
travaillé pendant près de douze ans sur cette ancienne colonie, nous offrant un
regard historique fondé sur les archives de Louisiane, de Suisse et de France.
Une documentation minutieuse, souvent inédite, lui a permis, sans le recours à
la fiction, de nous faire comprendre les destins de ceux qui se croisèrent sur
le Mississippi.
Propos recueillis par Marine de Tilly
LE FIGARO. –
Pourquoi la France s'est-elle séparée de la
Louisiane ?
MAURICE DENUZIÈRE. – Thomas Jefferson craignait que les Français, moins
accommodants que les Espagnols, s'assurent du contrôle du Mississippi et
empêchent le transport du commerce américain. Or, il avait besoin de la
Louisiane pour unifier le territoire d'est en ouest. Une délégation est donc
partie en France pour proposer au Consulat le rachat de ce qu'on appelait l'île
d'Orléans, c'est-à-dire La Nouvelle-Orléans et les chenaux qui permettent de
naviguer et de remonter le Mississippi. Les envoyés américains sont arrivés à
Paris au moment où la guerre était sur le point de reprendre entre la France et
l'Angleterre. Napoléon avait alors tout intérêt à négocier avec les Américains
pour repousser les risques de guerre.
Comment se sont passées les négociations ?
En trois jours, tout était réglé! Sans aucune résistance, Bonaparte concédait ce
territoire. Le 3 mai, l'acte de vente était signé par Bonaparte et le dossier
était entre les mains des ministres des Finances et des Affaires extérieures.
Après l'accréditation et le règlement avec les Espagnols, la passation a eu lieu
le 20 novembre 1803, en grande pompe à La Nouvelle-Orléans.
Combien la Louisiane a-t-elle coûté aux Américains ?
Bonaparte avait demandé à ce qu'elle soit vendue entre 50 et 100 millions de
francs. Le prix de la vente s'est finalement élevé à 60 millions.
Ce qui représente, en dollars ?
Quinze millions. Soit, à l'époque, l'équivalent d'un cinquième du budget de la
France. Ce qui n'était naturellement pas négligeable.
Les Américains ont-ils réglé l'intégralité de la somme ?
En réalité non. Ils n'ont pas versé les 15 millions de dollars prévus. Ils n'ont
donné que 12 500 000 dollars.
Pourquoi ?
Jefferson a déduit de la somme le prix des navires de commerce américains
arraisonnés par les révolutionnaires français. Il a estimé le préjudice à 2 500
000 dollars qu'il a soustrait des 15 millions. Il n'a donc versé que 12 500
000 dollars au Consulat.
Où les Américains ont-ils trouvé le financement ?
Thomas Jefferson et son secrétaire d'Etat aux Finances, un Suisse, Albert
de Gallatin, ont été contraints de faire des emprunts.
A qui ?
Aux Anglais et aux Hollandais. C'était une période assez difficile du point de
vue économique pour les Américains et ils n'ont pas vraiment eu le choix. Ils
ont emprunté à deux banques, avec des intérêts à 6 %.
Une bonne affaire pour la France ?
Oui, on peut considérer que c'était une bonne affaire. Pendant longtemps,
personne n'avait voulu de la Louisiane. Elle coûtait trop cher à ses colons.
Pour quelles raisons ?
A l'époque, le commerce ne comptait que sur l'importation et la Louisiane ne
produisait que peu de chose. Le climat insupportable, les infections de fièvre
jaune et la terre marécageuse posaient énormément de problèmes. Il a d'ailleurs
été très difficile pour les différents colons de peupler la région. Personne
n'en voulait !
Et le coton ? La canne à sucre ?
Ces deux commerces ont effectivement fait recette, mais seulement après la vente
de la Louisiane par la France. Economiquement, elle était encore faible au
moment de la transaction, alors qu'après 1803, notamment en 1812, elle a connu
une grande prospérité.
Comment la vente a-t-elle été perçue en France? Et en
Louisiane ?
En France, un certain nombre de personnes n'étaient pas du tout d'accord.
Chateaubriand, par exemple. Il pensait que la Louisiane était une grande
colonie. Il fallait selon lui la garder, l'exploiter et la développer. Cela dit,
il avait une vision très utopique de l'Amérique et je ne suis pas sûr qu'il y
soit vraiment allé ! Du côté américain, la grande majorité considérait que
c'était tout de même cher payé, pour un désert de marécages moyennement
fertile...
Or, 9 cents l'hectare quand on sait que la Louisiane avait
une superficie de 1 600 000 kilomètres carrés, ça fait beaucoup ! Même si cette
région représentait quand même la moitié du territoire américain. Aujourd'hui,
la Louisiane ne correspond qu'à un cinquième de la superficie de la France.
Maurice Denuzière vient de publier
Au Pays des bayous, Je
te nomme Louisiane,
et Pour amuser les coccinelles (Fayard).
Source : Le Figaro,
20.12.2003,
http://www.lefigaro.fr/international/20031219.FIG0247.html
Le Figaro : http://www.lefigaro.fr/
Editions Fayard :
http://www.editions-fayard.fr/
Un territoire grand
comme trois à quatre fois l'Hexagone
Le territoire de la Louisiane, cédé en 1803 par
Napoléon Bonaparte aux Etats-Unis et dont l'explorateur français René Cavelier,
sieur de la Salle, avait pris officiellement possession en 1682 au nom de
Louis XIV, était immense. Hormis les nombreuses tribus des Indiens d'Amérique,
la Louisiane française était relativement peu peuplée, avec à peine 50
000 habitants. Bien qu'aucun relevé géographique exact n'ait jamais été
effectué, sa superficie était estimée à environ 2 millions de kilomètres carrés,
soit près de quatre fois la France. La «Grande Louisiane» s'étendait alors le
long de la vallée du fleuve Mississippi jusqu'aux Rocheuses (sauf le Texas). Les
possessions récupérées ainsi par les Etats-Unis recouvrent aujourd'hui tout ou
partie d'une quinzaine d'Etats actuels de l'Union : Montana, Dakota du Nord,
Dakota du Sud, l'ouest du Minnesota, le Kansas, le Wyoming, l'Iowa, le Colorado,
le Nebraska, le Missouri, l'Oklahoma, l'Arkansas et l'actuelle Louisiane.
Source : Le Figaro,
20.12.2003,
http://www.lefigaro.fr/international/20031219.FIG0261.html
La loi de 1916
a fait
de l'anglais la seule langue autorisée à l'école
Deux siècles
de lente
disparition des francophones
Vendredi, Napoléon et Thomas Jefferson passaient au tribunal à
La Nouvelle-Orléans. Dans un procès spectacle mis en scène par le barreau
francophone de Louisiane, le premier était jugé pour avoir abandonné les
Français vivant en Louisiane en 1803. L'acte de vente, disait l'accusation, ne
prévoyait pas suffisamment de garanties de protection de la culture et de la
langue française. Jefferson était lui accusé, entre autres, d'avoir tenté de
faire disparaître la langue française.
Deux siècles plus tard, que reste-t-il du français en
Louisiane? «Y a mon voisin et moi», rigole le chanteur Zachary Richard.
Difficile d'ailleurs d'apercevoir un voisin depuis sa maison cachée sous les
arbres. Selon les chiffres plus précis du dernier recensement, ils seraient
encore 200 000 francophones en Louisiane. Les grands-parents de Zachary Richard
appartenaient à la dernière génération de «francophones monolingues». Ses
parents, octogénaires aujourd'hui, «ont rencontré l'assimilation de manière
brutale». La loi de 1916 fait de l'anglais la seule langue autorisée à l'école.
Pas très loin, à Basile, en plein pays cajun, Daniel,
62 ans, raconte «les bleus sur les fesses», les coups de fouet reçus à l'école à
chaque fois qu'il parlait français. Lorsque «l'américanisation» bat son plein à
partir des années 30, il devient mal vu de parler français. Les «Texiens» et les
autres anglophones arrivent afin d'exploiter le pétrole de la région. Pour se
faire embaucher dans ces entreprises qui paient mieux qu'ailleurs, il faut
parler anglais. Un commerçant installé en pays cajun se souvient comment un ami
employé à la banque lui avait déconseillé d'y parler français s'il voulait y
faire un emprunt.
Ceux qui continuent à parler français sont agriculteurs ou
éleveurs et ne sont pas allés à l'école. «C'est à ce moment-là que le français
est associé à l'ignorance et à la pauvreté», raconte Zachary Richard dont le
bureau, entre documents familiaux et livres de la fin du XIXe siècle, est un
véritable petit musée d'histoire de la Louisiane. Ses parents lui ont parlé en
français. La plupart des gens de cette génération évitaient de le faire, croyant
que l'anglais assurerait plus de portes ouvertes à leurs enfants. David Chéramie
entendait ses parents discuter en français, entre eux seulement. De cette
langue, lui ne connaissait que «maudit diable», les jurons et les insultes. Il a
réappris le français plus tard, explique-t-il dans le bureau du Codofil décoré
d'une pancarte «Ici on est fier de parler français».
Le Conseil pour la défense du français en Louisiane est né
du «réveil ethnique» des années 60. Autre écho, les programmes d'immersion au
français mis en place dans les écoles dans les années 80: les élèves suivent
tous leurs cours en français, à l'exception d'une heure d'anglais par jour. Près
de 3 000 enfants sont aujourd'hui inscrits dans ces programmes d'immersion, des
Cajuns qui tiennent à leur héritage comme des «Américains» qui veulent une carte
de plus pour leurs enfants. «Ici, le programme est devenu intouchable», se
réjouit Nicole Boudreaux, responsable de celui de Lafayette qui, avec
830 élèves, est le plus gros de Louisiane. A quelques kilomètres de là, celui
d'une école fréquentée essentiellement par des enfants noirs met la clé sous la
porte, faute d'élèves dans les classes. «La nouvelle directrice n'y tenait pas.»
Ils ne sont peut-être plus que quelques poignées à pouvoir dire «I am an
American mais je ne suis pas américain», mais le français est encore là, de
l'avenue du Général-de-Gaulle de La Nouvelle-Orléans jusqu'au village de Grosse
Tête en pays cajun. «Le français fait partie de notre identité, même pour ceux
qui ne parlent pas la langue», note David Chéramie.
Les Cajuns de Louisiane se sont officiellement réjouis des
excuses récentes du Canada pour les «torts historiques» endurés par les
Acadiens, ces Canadiens francophones victimes d'une déportation massive entre
1755 et 1763. Secrètement, on ne sait pas bien si on doit s'en plaindre. «S'il
n'y avait pas eu le Grand Dérangement, on serait en train de se geler sous un
mètre de neige», rigole David Chéramie.
Source : Le Figaro,
20.12.2003,
http://www.lefigaro.fr/international/20031219.FIG0260.html
Il y a deux cents ans,
Napoléon vendait ce territoire aux
Américains
En Louisiane,
la nostalgie française a des états d'âme
Au moins, Antonin Scalia est venu. Engoncé dans son costume, cheveux
charbons tirés en arrière, le plus célèbre juge de la cour suprême des
Etats-Unis parce que le plus conservateur est là, occupé à descendre des
flûtes de champagne et à gober les petits fours. Il a fait, ce week-end, le
déplacement de Washington à la Nouvelle-Orléans pour participer au bicentenaire
du rachat de la Louisiane à la France, une des rares occasions de célébrer
aujourd'hui l'amitié franco-américaine. Il n'a pourtant pas encore pardonné aux
Français : «Les récents événements ont mis à rude épreuve ma francophilie. Vous
savez, mon fils est capitaine d'infanterie à Bagdad», grogne-t-il. Malgré tout,
pour les francophones de Louisiane, sa présence est encourageante : c'est le
signe que les plaies peuvent se refermer.
Rendez-vous manqué.
Il y a deux cents ans, lorsque la France et les
Etats-Unis s'entendaient bien, la Louisiane était un territoire qui couvrait
quinze Etats actuels, des Grands Lacs au golfe du Mexique. Napoléon, occupé à
guerroyer en Europe, avait décidé de se débarrasser de ce fardeau pour renflouer
ses caisses. Thomas Jefferson avait pu doubler la taille des Etats-Unis de
l'époque, en achetant la Louisiane «pour une chanson» comme disent les
Américains, c'est-à-dire pour des cacahuètes : 15 millions de dollars de
l'époque (250 millions de dollars aujourd'hui).
En 1903 et en 1953, les présidents Theodore Roosevelt et Dwight Eisenhower
s'étaient déplacés à la Nouvelle-Orléans pour célébrer l'anniversaire de cet
acte fondateur de la conquête de l'Ouest. Mais George W. Bush, au début du mois,
a décliné l'invitation, prétextant un «conflit d'emploi du temps». Jacques
Chirac, qui aurait bien aimé revenir sur les lieux de sa jeunesse (étudiant, il
a passé quelques mois à la Nouvelle-Orléans) n'a donc pas reçu d'invitation
officielle. Ce rendez-vous manqué a déprimé les défenseurs louisianais de la
francophonie, qui ne cessaient ce week-end de se désoler : «C'est bien
malheureux», «Nous sommes très désappointés (franglais pour «déçus», ndlr)»...
Et malgré un soleil agréable, les cérémonies étaient tristounettes. Il y a bien
eu, devant un parterre de notables endimanchés réunis sur l'ancienne place
d'armes (aujourd'hui Jackson Square), quelques flonflons, quelques discours, un
coup de canon et beaucoup de tricornes et baïonnettes... Cependant, le coeur n'y
était pas vraiment. Le président de l'Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, est
venu représenter la France en coup de vent ; Washington, pour sa part, avait
dépêché sa secrétaire à l'Intérieur, Gale Norton.
Pastiche de procès.
Vendredi après-midi, au palais de justice, les
juristes francophones de Louisiane ont organisé le procès de Napoléon et de
Jefferson, accusés d'avoir acheté et vendu tout un peuple comme du bétail.
Napoléon, qui portait un costume très fidèle à l'original, à quelques paillettes
près, s'est défendu en prétextant que, sans cette vente, une guerre avec les
Anglais aurait probablement ravagé la Louisiane. Jefferson s'est félicité
d'avoir roulé dans la farine le Premier Consul. Au terme de ce pastiche bon
enfant, Napoléon a été blanchi, et Jefferson condamné à des excuses pour avoir
tué la culture et langue françaises, déporté les Indiens et aggravé la situation
des Noirs de Louisiane. Antonin Scalia, qui était l'un des juges (mais muet),
n'a pas apprécié le verdict : «Blanchir Napoléon et condamner Jefferson ! C'est
parfaitement injuste», a-t-il ronchonné.
Ce procès était une farce ; toutefois, pour ses participants, il a permis
de soulever quelques sujets sérieux. «Napoléon nous a abandonnés, c'est la
conviction qu'on a toujours transmise dans ma famille», déclare ainsi Jean
Hernandez, 59 ans, un des avocats des plaignants (les peuples créoles, cajuns,
indiens et noirs). «Après le rachat par les Américains, la France s'est
désintéressée de nous. Pendant un siècle et demi, dans le sud-ouest de la
Louisiane, on a vécu repliés sur nous-mêmes. Parler français était infamant. Il
a fallu attendre les années 1960 pour qu'on commence à relever la tête et à se
battre pour notre culture.» Ce sursaut est venu après une longue période de
répression de la langue française, décidée dans les années 1920.
«La patate».
Enis White, un Cajun élevé dans les bayous de la
région de Chauvin (son père était pêcheur de crevettes) se souvient encore
douloureusement de son arrivée à l'école primaire, en 1951 : «J'avais 6 ans, et
je ne parlais pas un mot d'anglais. Je me faisais punir dès que je parlais
français : je devais me mettre à genoux dans la cour, ou bien je recevais des
coups de règles.» «On sait bien que le français va disparaître un jour. Notre
lutte vise simplement à retarder la date», commente Warren Perrin, président du
Conseil pour le développement du français en Louisiane. Signe que le combat est
dur : quand il parle, Perrin saute du français à l'anglais. «Faut tenir, faut
pas lâcher la patate», ponctue (en cajun, cette fois) son collègue Charles
Larroque.
En Louisiane, la querelle franco-américaine de 2003 a été un cauchemar.
Elle a jeté les Cajuns dans des dilemmes : «C'était un déchirement terrible :
les Cajuns sont très patriotes, mais ils aiment énormément la France», explique
David Marcantel, l'auteur du texte du procès simulé. En mars, au plus fort de la
querelle, le député Billy Tauzin, qui se répète «fier de [ses] racines
françaises», avait rageusement débranché la partie francophone de son site web.
A cette date, il ne l'a toujours pas restaurée.
Pascal Riche, Libération, 22.12.2003,
http://www.liberation.fr/page.php?Article=166987
Trois nations pour un Etat
1682.
René Robert Cavelier de La Salle prend possession de la
Louisiane.
1718.
Fondation de La Nouvelle-Orléans.
1763.
Rétrocession de la Louisiane aux Espagnols.
1764.
Arrivée en Louisiane de milliers d'Acadiens bannis du Canada
par les Anglais («Grand Dérangement»).
1801.
La France rachète secrètement la Louisiane aux Espagnols.
1803.
Cession aux Etats-Unis.
1812.
La Louisiane devient le 18e Etat de l'Union.
1921.
La Constitution louisianaise interdit
l'usage de toute autre
langue que l'anglais.
1974.
Retour du français dans les écoles primaires.
Libération, 22.12.2003,
http://www.liberation.fr/page.php?Article=166988
Louisiane
Historique de la présence française
1673 - Les Français Marquette et Joliet explorent le
Mississippi.
1682 - Cavalier de la Salle prend possession de la
Louisiane,
ainsi baptisée en l'honneur de Louis XIV.
1718 - Création de La Nouvelle-Orléans et timide essor
de
la colonie.
1760 - Arrivée des premiers Acadiens, chassés de leurs
terres
du Canada par les Britanniques. Ils sont poussés à s'installer dans les
mauvaises terres des bayous du sud de La Nouvelle-Orléans.
D' Acadiens, ils
deviennent " Cajuns ".
1762 - Découragé par les mauvais résultats économiques de
sa colonie, Louis XV offre la Louisiane à l'Espagne. Les Espagnols attendent
1768 pour s'y installer.
1803 - Napoléon vend la Louisiane aux Etats-Unis pour 15
millions de dollars.
1812 - Instauration de l'Etat de Louisiane (les Etats-Unis
ont divisé l'immense territoire de la Louisiane d'origine, qui s'étendait
jusqu'au sud des Grands Lacs, en plusieurs Etats).
Pour plus d'infomations,
consultez le site sur la
Louisiane,
site
réalisé par le Ministère de la Culture:
http://www.louisiane.culture.fr
Louisiane >
Historique de la présence française, copié 23.10.2005,
Consulat général de
France à la Nouvelle-Orléans,
http://www.consulfrance-nouvelleorleans.org/index.asp?dir=historique&slot=nomMenu2#top
Voir aussi
/ Related > Anglonautes > History
20th century > USA > Civil rights
Quand l'Amérique était
française
17th, 18th, 19th, 20th century
English America, America, USA
Racism,
Slavery,
Abolition, Civil war,
Abraham Lincoln,
Reconstruction
17th, 18th, 19th century
English America, America, USA
America, English
America, USA, world
From the 17th century
to the early 21st
century
Louisiana
http://en.wikipedia.org/wiki/Louisiana_Territory
Louis XIV of France
http://en.wikipedia.org/wiki/Louis_XIV_of_France
Louisiana / Louisiane >
Bonparte > The Louisiana Purchase 1803
http://memory.loc.gov/ammem/today/oct20.html
http://memory.loc.gov/ammem/amlaw/louisiana_res.html
http://memory.loc.gov/ammem/amlaw/louisiana5.html
http://www.loc.gov/exhibits/bnf/bnf0005.html
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